De quelle façon le Ministère de l’écologie a-t-il calculé ce qu’il appelle la « neutralité économique » de la prolongation ? Comme il y a des grosses incertitudes et même des controverses là-dessus, peut-il donner les modalités de ses calculs et en particulier concernant le prix de l’électricité sur les marchés de gros à partir desquels il a fait ses projections pour les 18 ans qui viennent. A-t-il fait des hypothèses hautes? basses ? moyennes ? Quelles sont précisément ces hypothèses ?

De quelle façon le Ministère de l'écologie a-t-il calculé ce qu'il appelle la "neutralité économique" de la prolongation ? Comme il y a des grosses incertitudes et même des controverses là-dessus, peut-il donner les modalités de ses calculs et en particulier concernant le prix de l'électricité sur les marchés de gros à partir desquels il a fait ses projections pour les 18 ans qui viennent. A-t-il fait des hypothèses hautes? basses ? moyennes ? Quelles sont précisément ces hypothèses ?

Réponse du Ministère de la transition écologique et solidaire

Le principe de la neutralité économique réside dans la fait que le concessionnaire ne doit pas tirer une valeur indue de la prolongation de la concession. Il s’agit donc, dans un premier cas, de calculer les revenus pour le concessionnaire d’ici 2023 en l’absence de prolongation et, dans un second cas, de calculer les revenus du concessionnaire avec les flux financiers dont il bénéficiera en cas de prolongation jusqu’en 2041. Les revenus du concessionnaire doivent être équivalents dans les deux cas pour garantir la neutralité économique (d’un point de vue plus technique ce sont les revenus actualisés, c’est-à-dire les revenus rapportés à une même date de référence pour tenir compte de la valeur temps de l’argent qui doivent être égaux). En pratique, c’est le mécanisme de redevance variable qui a constitué la variable d’ajustement, afin d’équilibrer ces flux.
Dans le premier cas, ces flux financiers sont évalués sur la base du cahier des charges actuel (notamment en ce qui concerne la redevance) et en reprenant les flux historiques de CNR (revenus de l’hydroélectricité, redevance actuelle à 24%, dépenses d’exploitation et de maintenance, taxes etc.) et en les indexant jusqu’en 2023.
Dans le deuxième cas, il a été tenu compte des flux jusqu’en 2023 et au-delà mais également des nouvelles dépenses mises à la charge de CNR :

  • Les coûts supplémentaires lié aux extensions géographiques,
  • Le montant du programme de travaux et les revenus qu’en tirera CNR à l’achèvement des travaux le cas échéant,
  • La poursuite du schéma directeur, sous la forme de plans pluriannuel quinquennaux, avec les nouveaux montants plus élevés tels qu’envisagés dans le projet,
  • Le nouveau système de redevance variable.

L’ensemble des revenus ou charges sont indexés de manière différente pour tenir compte de la nature des flux concernés, et également du facteur de vétusté pour les dépenses de maintenance.
Les prévisions long terme d’inflation établies pour la France par le FMI servent d’indice pivot.

Pour les prix de l’électricité, bien que sur le très long terme les analyses passées montrent que le marché de l’électricité évolue sensiblement autour du rythme de l’inflation générale (hors chocs pétroliers), ses variations de court ou moyen terme peuvent être fortement volatiles et subir des variations à la hausse et à la baisse de manière parfois sensible d’une année sur l’autre, ce marché étant impacté fortement par de multiples facteurs. Ainsi l’hypothèse de prix de l’électricité envisagée à ce stade est constitué des prix issus de données de marché (cours de la bourse EPEX) moyennes pour les premières années, jusqu’en 2022 (dernière date à laquelle des données de marché sont disponibles. Au-delà de 2022, le dernier prix de marché disponible est prolongé avec une hypothèse d’inflation jusqu’en 2041. Cela représenterait un prix moyen sur la période légèrement supérieur à 50€/MWh, cohérent avec les hypothèses de prix retenues par le gouvernement dans le cadre de la révision de la Programmation Pluriannuelle de l’Énergie.

Enfin, le modèle prévoit un mécanisme de redevance spécifique basé sur des taux de taxation marginaux croissants du chiffre d’affaires. Le tableau ci-dessous présente le barème tel qu’il est envisagé à ce stade dans le projet de prolongation :

Prix de marché Taux applicable
Inférieur à 26,5€/MWh 10 %
Entre 26,5 et inférieur à 50€/MWh 34 %
Entre 50 et inférieur à 80€/MWh 60 %
Au-delà de 80€/MWh 80 %

Lecture du tableau : lorsque le prix de l’énergie dépasse 50€/MWh, chaque euro de chiffres d’affaires supplémentaire serait taxé à 60%, et au-delà de 80€ cette taxation du chiffre d’affaires passerait à 80%.

Ce double système (indexation des prix de l’électricité – redevance variable) permet d’assurer un équilibrage du dispositif, malgré le caractère volatile des prix. En cas de forte hausse certaines années, l’État sera assuré de capter la grande majorité des revenus supplémentaire induits.
Des études de sensibilité ont été réalisées par l’Etat afin de constater les impacts sur le modèle d’une évolution plus favorable ou plus défavorable des prix de l’électricité, ainsi que sur l’ensemble des facteurs principaux (en particulier les hypothèses de coûts) : il ressort de ces analyses que le système est globalement équilibré, avec une asymétrie en faveur de l’Etat lorsque les prix de l’électricité augmentent fortement, du fait de la redevance variable.

Comme cela a pu être évoqué par le Ministère à plusieurs reprises, cette neutralité économique de la prolongation de la concession fait l’objet d’une instruction de la part de la Direction Générale de la Concurrence (DG COMP) de la Commission Européenne au titre du droit des aides d’État. L’ensemble des éléments présentés ci-dessus pourraient donc évoluer, notamment en fonction des discussions avec la Commission Européenne. La Commission Européenne devra se prononcer formellement sur la compatibilité de ce mécanisme avec le droit européen.

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